•  

    Servir. Un mot qui a bonne réputation.

     

    Un mot qui n'est pas dépourvu d'ambiguïtés concrètes.

     

     

     

    Parler de service, c'est parler de disponibilité, de mise en sommeil de ses propres affaires pour se mettre à la disposition d'une cause qui n'est pas immédiatement la nôtre.

     

    Le service nous décentre et nous fait dépasser l'horizon de nos intérêts personnels.

     

    Le temps lui-même change de sens. Ce qui paraissait urgent ne l'est plus autant que le service à rendre. Cela peut attendre à demain ! Le temps peut enfin s'étirer, sans nous emprisonner.

     

    En nous subordonnant aux besoins de l'autre, nous nous libérons de nous-mêmes.

     

     

     

    Parler de service, c'est aussi parler de volonté, de décision, de choix.

     

    Il ne saurait y avoir service au terme d'une contrainte quelconque.

     

    Le service est affaire de liberté.

     

    Il est un engagement de tout notre être au bénéfice de quelqu'un d'autre.

     

    "Quelqu'un" ! Car même s'il s'agit d'une cause, cette cause n'a de valeur qu'en fonction des personnes qu'elle concerne.

     

    Peut-être est-ce l'occasion d'opérer un premier discernement : il est des causes au nom desquelles on tue pour tuer - telle la secte d'Aoun - et des engagements qui lient ceux qui s'y consacrent sous peine de mort - pratique courante dans des groupes extrémistes.

     

     

     

    Parler de service, c'est, en même temps que de vouloir, parler de non-vouloir.

     

    Le service est la réponse à un appel plus fort que soi, auquel on se soumet.

     

    On ne peut pas y résister parce qu'il éveille en nous un écho profond.

     

    Parfois même, il réveille et fait venir à la conscience le sentiment de notre solidarité avec ceux qui appellent, que ce soit pour des causes humanitaires, religieuses, éthiques...

     

    Même si nous n'avons pas été désignés nommément par l'appelant, nous sentons intérieurement que nous sommes appelés. Nous nous savons appelés.

     

    C'est à ce moment décisif que beaucoup d'appelés se rétractent : ils voudraient bien, et même ils veulent bien... mais ils sont retenus par la crainte d'être obligés de se soumettre au vouloir de l'autre. Ils ont peur de se perdre.

     

    Or vouloir servir, c'est accepter de se dépouiller de son propre vouloir.

     

    Seul demeurera le vouloir et le besoin de l'autre auquel on s'efforcera de répondre, non pas selon nos critères, mais selon les siens.

     

    Notre maître est celui au service duquel nous mettons nos forces.

     

    Le salaire du serviteur est la joie de celui auquel il se donne, son maître.

     

     

     

    Le service n'est pas exempt de dangers pour celui qui sert : épreuves, maladies, fragilisation psychologique...

     

    Mais le serviteur fait aussi courir des dangers à ceux qui sont l'objet de son service, tenté qu'il est d'utiliser sa supériorité et de finir par s'imposer.

     

    Il peut se croire indispensable au point d'empêcher de s'épanouir dans l'autonomie ceux auxquels il se consacre en courant les risques de leur propre vie.

     

    Il peut transformer son service en colonisation rampante.

     

    Nombreux sont également ceux qui se croient appelés et qui ne le sont pas.

     

    Ceux-là sont habités par une tentation impérialiste, faisant régner leur "moi" sur les autres, allant jusqu'à plaindre ceux qui n'ont pas eu la "chance" de bénéficier de ce qu'ils appellent leur service.

     

    Ils parviennent souvent à leurs fins car ils impressionnent par leur assurance.

     

    Mais ils ne servent qu'eux-mêmes et transforment les autres en adulateurs inconditionnels, en serviteurs-esclaves de ce qu'ils croient être leur volonté de service.

     

    Ils agissent en personnes qui ne parviennent pas, quoi qu'ils en aient, à ne pas se sentir supérieures à ceux au service desquels ils prétendent se mettre.

     

     

     

    Le danger n'est pas propre à quelques-uns, et nous aurions tort de désigner des boucs-émissaires à titre d'exemple.

     

    Le danger est commun à tous.

     

    Le serviteur parfait n'est pas de ce monde.

     

    Notre volonté de service ne sera jamais qu'une pâle imitation de Celui qui Seul a su S'établir totalement dans la condition de Serviteur.

    fr. André LENDGER


    votre commentaire
  •  

    Pour l'honneur de Dieu, parce que Dieu est grand.

     

    On tue, on exécute, on assassine, on viole, on torture, on châtie...

     

    Il y a peu de temps encore, de tels excès étaient l'apanage des idéologies matérialistes. Les religions et leurs institutions apparaissaient alors le plus souvent comme le refuge de la paix et de la liberté, une digue contre la violence et l'arbitraire politiques.

     

    Jean-Paul II réunissait les représentants des plus vénérables religions de la terre pour les inviter à une prière commune pour la paix à Assise, tandis que déjà se levaient d'inquiétantes ardeurs intégristes un peu partout.

     

    Aujourd'hui ce sont les religions qui sont le prétexte de toutes les violences.

     

    On ne se contente pas d'invoquer des valeurs religieuses.

     

    On se recommande de Dieu lui-même en toute assurance pour supprimer son frère.

     

    On agit en Son nom, faisant de Dieu un donneur d'ordres assassins Au nom de Dieu :

     

                 on a condamné à mort Salman Rushdie.

     

                on a exilé Tasliman Nasreen.

     

                on s'entretue quotidiennement en Algérie.

     

                on vient d'assassiner Yitzhak Rabin ("on", car même si l'assassin a été arrêté, il n'a été que l'instrument docile d'un courant fanatique et hystérique).

     

    C'est au nom de frontières ethnico-religieuses qu'a été déchirée l'ex-Yougoslavie et que nombre de pays africains ( le Nigéria) ou asiatiques (Inde, Ceylan) sont fragilisés.

     

     

     

    De quel Dieu parle-t-on ?

     

    Le Dieu (ou les divinités) auquel se réfèrent la plupart des hommes est partout reconnu comme un Dieu de paix.

     

    Pour les croyants de religions révélées, d'où pourrait venir l'idée que le Dieu qui a créé l'homme à Son image pourrait ordonner la mort d'un homme, quel qu'il soit ?

     

    Tuer pour servir Dieu ?

     

    Depuis quand Dieu a-t-il besoin du sang humain pour défendre sa cause ? Il y a déjà quelques siècles que l'homme a compris que Dieu, quelque conception qu'il en ait,  n'était pas un Moloch assoiffé de sacrifices humains.

     

    Ce sont les hommes qui, par vol et par effraction, s'emparent de Dieu, dérobent et falsifient Son Nom et s'en font les possesseurs abusifs pour justifier leurs passions meurtrières.

     

    Ce sont les hommes qui prennent les initiatives que Dieu se garde bien de prendre !

     

     

     

    Dieu suscite et mérite la passion, mais il s'agit de la passion de la vie.

     

    Qu'on dispute, ferraille ou s'enflamme verbalement pour Dieu, rien de plus naturel puisque Dieu est à l'origine et au terme de nos vies.

     

    L'idée qu'on se fait ou ne se fait pas de Dieu en décide l'orientation.

     

    Mais l'important est-il l'idée qu'on se fait de Dieu ou ce que Lui nous révèle de Lui ?

     

    C'est là que le bât blesse chacun d'entre nous : nous devrions n'être qu'écoute de Dieu alors que nous faisons tant de bruit que nous couvrons Sa voix.

     

     

     

    Peut-il en aller autrement ?

     

    Ne pas mêler Dieu à nos passions humain est impossible, car Il nous parle par tout nous-mêmes, chair et esprit, et nous Le recevons selon ce que nous sommes.

     

    Mais en aucune occasion la voix de Dieu ne donne l'ordre de tuer.

     

    Il est vrai que, pour les chrétiens, la vie peut jaillir de la mort.

     

    Mais Celui que nous appelons "Le Vivant" refuse que la vie puisse venir d'une mort autre que la mienne. Sinon celle du sang, du moins celle de mon assurance.

     

     

     

    Dieu nous pose une question sur Lui et sur nous.

     

    Nous ne pouvons pas nous y dérober, car elle est au centre de nos destinées.

     

    Dieu nous met en question sur la qualité de nos rapports avec nos ennemis,

     

                au nom de la Vie.

     

                jamais au nom de la Mort.

     

     

     

    Dieu peut armer nos cœurs... pour l'amour, jamais nos bras... pour la vengeance.

     

    Tuer au nom de Dieu est la pire perversion du croyant, c'est le plus grand blasphème,  c'est dire de Dieu et Lui faire dire le contraire de ce qu'Il est.

     

    Au nom de nos passions !

     

                "Je vous donne ma paix" !

    fr. André LENDGER


    votre commentaire
  • Les relations incestueuses.

    La presse locale y fait largement écho.

    La justice est souvent appelée à en délibérer.

     

    Hier le phénomène demeurait caché et ne venait que rarement au grand jour.

    Aujourd'hui les victimes de tels abus peuvent trouver une assistance accrue auprès des services sociaux, du téléphone vert... et la justice peut plus facilement faire son travail.

    L'inceste vient au grand jour.

    L'inceste est combattu.

    L'inceste demeure cependant une pratique fréquente.

     

    On peut invoquer les conditions de vie, la promiscuité familiale, les problèmes sociaux, la perte des repères humains et moraux, la pauvreté culturelle... Mais l'inceste n'est pas l'affaire d'un milieu social. Il se pratique dans toutes les catégories de la population.

    La répression n'en diminue pas la fréquence.

     

    Comment comprendre que dans notre société évoluée, où la misère régresse, où l'instruction se répand, de telles pratiques se perpétuent ?

    Le phénomène traduit sans doute une nouvelle pauvreté, celle de la vie affective.

    La liberté des mœurs ne s'est pas accompagnée de son corollaire indispensable, le développement de la responsabilité et la consolidation de l'affectivité.

    Les pulsions sont exacerbées par les médias, les affiches 36-15, les cassettes-vidéo, certaines radios et une publicité omniprésente qui provoquent une excitation dont on ne peut pas ne pas être affecté. Le chômage, le désœuvrement, l'alcoolisme, l'immaturité des sentiments accentuent la fragilité des êtres. Tout cela sur fond d'absence de sens de la vie, de dislocation des valeurs et d'éclatement social. Rien de solide à quoi se raccrocher !

     

    Les passages à l'acte incestueux signifient les difficultés pour leurs auteurs à trouver leur identité, leur place et leur rôle dans les relations familiales, affectives et sexuelles.

    L'autre, ses propres enfants, est réduit, de façon inconsciente, à l'état d'objet.

    L'incapacité à trouver son identité entraîne des processus fusionnels au terme desquels l'autre n'existe plus en tant qu'autre et n'est que le prolongement indistinct de soi.

     

    Le papa ne sait plus être père.

    Il ne se reconnaît plus comme l'éducateur de ses enfants.

    Sa propre fille n'est qu'une fille parmi d'autres, plus proche et plus familière, fraîche et soumise, à portée de main, à laquelle on prête les mêmes pulsions que les siennes.

    La distance entre les personnes est abolie !

    Que dire alors des "petits pères" !

    Comment n'éprouveraient-ils pas plus de mal que d'autres, dans le flou du contexte affectif ambiant, à établir des relations saines avec la fille de leur concubine ?

     

    Les filles, souvent très jeunes lors des premiers rapports, se retrouvent sans défense devant des relations forcées, traumatisantes et répétées, blessées au point de se sentir elles-même honteuses et coupables de ce qu'elles ont subi au plus intime d'elles-mêmes.

    Les mères ne sont pas toujours innocentes, soit qu'elles consentent, soit qu'elles ferment les yeux et se taisent, soit que, déchirées, elles se sentent dépassées et paralysées.

    Les parents ne sont-ils que coupables ? ne sont-ils pas, dans une certaine mesure, victimes de leur misère affective, de l'anarchie de leurs pulsions, de l'environnement social, de la pression des médias, n'ayant jamais eu l'occasion de bien connaître leur sexualité ?

     

    La justice et l'aide aux victimes doivent continuer leur travail.

    Mais elles ne peuvent intervenir qu'après coup. Trop tard.

    La tâche essentielle est celle qui précède, la prévention, qui doit s'adresser non seulement aux mineures mais aussi aux adultes, aux parents, aux familles.

    Combattre ce mal où s'additionnent tant de misères affectives,

                - c'est affaire d'éducation et d'approfondissement de chacun, pour connaître la portée de ses actes et avoir le courage de leur donner un nom quand il est temps encore.

                - c'est, avant de condamner les personnes dites coupables, se comporter en citoyens responsables d'une société qui développe tant de dérives et de folles incitations .

                - c'est enfin aimer sans distinction toutes celles et tous ceux qui sont impliqués dans ces drames, tous victimes à un degré ou à un autre.

    fr. André LENDGER


    votre commentaire
  •  

    "Pourquoi Dieu permet-il une telle souffrance ?"

     

    Question sans cesse ressassée par des hommes et des femmes sur leurs lits de douleur ou piégés dans des situations humaines inextricables.

     

    Question à laquelle il n'est pas de réponse.

     

     

     

    Dieu ne veut pas la souffrance.. Dieu ne veut pas le sang versé.

     

    Il a créé l'homme pour le bonheur, non pour le malheur.

     

    Il l'a créé par amour et pour que l'homme vive de cet amour.

     

    Comment et pourquoi les hommes en sont-ils réduits à souffrir et à s'entretuer ?

     

    La question n'a cessé de hanter l'esprit humain : comment et pourquoi un Dieu, qui ne peut être que bon, a-t-il pu laisser le mal envahir sa création jusqu'à la défigurer ?

     

    Des histoires, des contes, des mythes, ont tenté de rendre compte de l'insoutenable.

     

    On se borne souvent à dire que la souffrance, le mal et la mort trouveraient leur origine dans ce que nous appelons le "péché originel" commis par Adam et Eve.

     

    Simple hypothèse ? Réalité historique ? Fable infantile ?

     

    Le récit de la Genèse ne prétend pas donner une explication au problème du mal.

     

    Il est né de la réflexion des hommes sur l'expérience de leur condition tragique. Ils ont cherché à en rendre compte sous la forme d'un récit, sans souci historique.

     

    Si l'on tenait que le péché d'Adam est l'origine du mal, on serait conduit à dire que le mal est une punition de Dieu et que Dieu est un juge irascible et implacable.

     

    Mais si l'on comprend que ce récit est le fruit d'une méditation de l'homme sur sa condition, sans prétention théorique mais avec une profondeur qui n'a pas d'égal, nous sommes conduits à donner au mal une signification autre qu'une punition divine.

     

     

     

    Le mal, la souffrance et la mort n'ont aucun sens. Il ne mènent qu'au néant.

     

    Dieu n'a pas pu les vouloir.

     

    Au contraire Dieu leur a opposé un refus tel qu'Il s'y est livré en la personne de Jésus, pour engager avec nous et en nous, au coeur de notre être, le combat contre le mal.

     

    De la souffrance et de la mort de Jésus a jailli la victoire de la Vie.

     

    La souffrance, le mal et la mort se retournent en promesse de vie

     

     

     

    Cette promesse nous délivre plusieurs messages :

     

                - Nous ne pouvons pas éviter la déchirure de la souffrance (qu'elle soit physique ou psychologique) et de la mort. Nous ne pouvons que les accueillir quand elles surviennent, comme un passage obligé, si scandaleux soit-il.

     

                - "Accueillir" la souffrance cela ne signifie pas que nous devions y être soumis comme des victimes passives et consentantes. Mais puisque nous ne pouvons pas ne pas subir sa dictature, puissions-nous avoir assez de force pour la circonscrire, la dominer et l'étouffer sous le poids de l'espérance.

     

                - Garder l'espérance, même au plus profond de nos ténèbres. Le Christ ne fera sans doute pas un miracle pour nous sauver d'un mal imminent ou d'une souffrance intolérable (cette sorte de "salut" est affaire des hommes). Mais Il est au cœur de notre souffrance et de nos ténèbres. L'Homme sur la Croix nous habite. Il vit notre passion. "Ce n'est plus moi qui vis, c'est le Christ qui vit en moi"... jusque dans ma propre déréliction.

     

                - Nous n'avons jamais le droit de faire souffrir un frère humain au nom du Dieu de Vie. Or aucune attitude n'est plus difficile que l'acceptation de la différence dans un domaine, la foi, où les passions sont d'autant plus fortes qu'elles engagent les orientations les plus radicales de notre existence. Nous ne pouvons que croire, avec une marge d'incertitude. Même si nous étions sûrs, la vérité ne s'assène pas, elle se découvre.

     

                - On ne peut pas justifier la souffrance au nom de Dieu en disant : "c'est Dieu qui l'a voulu" ou "Dieu t'envoie cette épreuve", ou "Dieu te punit"... Nous n'avons pas besoin de Dieu pour nous mettre dans l'épreuve. Mais si nous y sommes, Dieu est concerné. Non qu'il soit la cause de notre mal. Au contraire, Il est à nos côtés et lutte avec nous.

     

     

     

    Pourquoi Dieu permet-il... ? disons-nous souvent.

     

    Ne devrions-nous pas plutôt dire : pourquoi l'homme se plaît-il à la violence, à la haine, à l'injustice, au machiavélisme, pourquoi s'ingénie-t-il à faire souffrir les autres ?

     

    Dieu, du haut de la croix de Jésus, ne prend pas Son parti de notre souffrance.

     

    Il la vit, Lui qui l'a déjà  subie. Il la porte et la partage au plus profond de Lui-même.

     

    Il promet qu'au terme se tient l'entrée dans la Vie

    fr. André LENDGER


    votre commentaire
  •  

    "Ce n'est pas Dieu qui est injuste, ce sont les hommes."

     

    Ces paroles sont celles d'un grand handicapé moteur qui, en dépit de dysfonctionnements spectaculaires, a fait ses études et est devenu un technicien de valeur.

     

     

     

    Les hommes, pourquoi pas Dieu ?

     

    Parce que le mal, quel qu'il soit, échappe à la volonté divine.

     

    Il est le plus souvent la conséquence des actions et de la volonté des hommes.

     

    Parfois il est lié à la condition mortelle de l'homme, dont on ne peut accuser Dieu.

     

    Maladies, handicaps moteurs, déficiences psychologiques ou déviances affectives ne dépendent pas d'une décision à priori de Dieu. Ils introduisent dans une condition souvent douloureuse, à la suite de circonstances purement humaines.

     

     

     

    Ce n'est cependant pas pour cette raison qu'il faut déclarer l'homme injuste.

     

    Les hommes font ce qu'il peuvent et font des erreurs.

     

    La personne qui provoque un accident de voiture et en blesse une autre qui restera handicapée, n'a pas forcément commis une faute morale (sauf ivresse,...).

     

    Les parents dont l'enfant "tourne mal" ne sont pas forcément coupables. Bien souvent ils ont fait ce qu'ils pouvaient et on ne peut pas leur reprocher d'être ce qu'ils sont.

     

    L'injustice - qui est une faute morale - ne réside donc pas dans les causes du mal.

     

    Les hommes sont injustes parce que leur regard n'est pas bon.

     

    Ils sont injustes parce qu'ils gardent leurs distances avec ceux qui sont en dehors des normes conventionnelles, parce qu'ils se fabriquent des écrans protecteurs et dressent des barrières infranchissables, incapables d'assumer le spectacle de la différence de l'autre.

     

    Le regard des hommes cloue au pilori ceux ou celles qui n'ont pas l'apparence de "monsieur ou madame tout le monde".

     

    Objets de crainte, de répulsion et de rejet, c'est le lot des "différents".

     

    Tout handicapé le sait, l'éprouve et y décèle l'injustice des hommes à son égard.

     

     

     

    Qui n'est pas handicapé ?

     

    La plupart des humains le sont sans aucun doute. Mais beaucoup réussissent à le camoufler et continuent de présenter la façade lisse de la convention sociale.

     

    Mais il en est chez qui le handicap saute aux yeux..

     

    C'est pour ceux-là que nous avons à nous interroger sur notre regard.

     

     

     

    Comment ne pas penser, en ces jours où il est de nouveau question d'eux, aux malades du sida, lourdement handicapés par un mal inexorable ?

     

    Tout le monde en parle, mais le rejet, voire le mépris dont sont victimes nombre de malades (même si, à La Réunion, le milieu familial reste accueillant) demeure et ne facilite pas la prévention de la maladie.

     

    De peur d'être isolés, oubliés, abandonnés, évités, nombreux sont ceux qui se taisent sur leur mal et l'affrontent dans la solitude.

     

    Ils s'obligent à cacher leur maladie à leurs collègues de travail, au voisinage, à la famille, parfois même au conjoint ou à la conjointe !... pour se dérober aux regards inquisiteurs et accusateurs, aux questions indiscrètes, aux soupçons de toutes sortes, aux sarcasmes, aux jugements et aux condamnations morales.

     

    "Il l'a bien cherché !", commente-t-on avec ironie.

     

     

     

    Le mal, c'est la maladie, bien sûr.

     

    C'est le handicap, physique, psychique ou affectif.

     

    L'injustice, elle, vient du regard de l'homme

     

     dont l'œil scandalisé ne voit et ne retient de l'autre que son handicap et sa différence aux apparences de mal, lui refusant sa dignité et sa pleine qualité de personne humaine.

     

     

     

    Dieu, Lui, souffre du regard accusateur adressé à ceux qui souffrent. N'est-ce pas Lui qui est ainsi regardé et méprisé dans Son Corps, souffrant d'un handicap ou du sida ?

     

     

     

    Il ne nous appartient pas de savoir si le corps ou le cœur de l'autre sont sains.

     

    Il nous importe que notre oeil soit sain.

     

                Le regard de rejet porté sur les autres nous accuse et nous condamne.

     

                Le regard d'amour nous sauve l'un et l'autre.

     

    "L'œil est la lampe du corps"

    fr. André LENDGER


    votre commentaire