• Le procès du responsable politique n'aura pas lieu.

    L'homme politique, qui a fait tirer sur de jeunes fuyards est-allemands peu avant la chute du Mur, ne sera pas jugé.

     

    Aurait-ce été un procès politique, le procès d'un chef d'Etat qui n'hésitait pas à user de tous les moyens pour se maintenir au pouvoir ?

    Aurait-ce été un procès au cours duquel on aurait redonné leur dimension de droit commun à des actes destinés à des fins politiques ?

     

    Qu'on soit chef d'Etat ou simple citoyen, l'éthique humaine est la même pour tous.

    Cependant le Chef d'Etat dispose naturellement, en vertu de sa charge, de moyens autres que les simples citoyens. Il a, par exemple, le pouvoir de grâcier un condamné à mort - et donc de lui refuser sa grâce - dans les pays où cette institution existe encore, ou celui de déclarer la guerre.

     

    Mais un chef d'Etat n'a pas à se prévaloir de son pouvoir pour tuer froidement ou faire d'autres actes délictueux (cf. le Président Collor au Brésil).

    Il n'a pas à se maintenir à tout prix (le prix du sang) au pouvoir, mais à procurer la paix et la justice à chaque citoyen. Il n'y parviendra jamais par des moyens arbitraires et criminels.

    La raison d'Etat n'est pas l'intérêt particulier du chef de l'Etat ou de son régime.

    La valeur de la vie humaine, de toute vie humaine, est plus grande que le maintien d'un homme à la tête du pouvoir.

    La vie d'un seul homme, si gênant ou anonyme soit-il, est la limite, la frontière ultime sur laquelle bute le pouvoir d'un chef d'Etat.

     

    Le procès Honecker n'aura pas lieu.

    On peut le regretter, car il aurait permis une réflexion sur les limites des pouvoirs d'un homme d'Etat.

    Mais il existe tellement d'autres hommes d'Etat qui sont de véritables bourreaux pour leurs peuples - et qui continuent d'être reçus avec  tous les honneurs dans les instances internationales - que le cas Honecker apparaît bien bénin.

    Honecker n'aurait-il pas été le lampiste des chefs d'Etat, payant pour les autres ?

     

    Erich Honecker était malade.

    Il a défendu (maladroitement ou criminellement ?) une cause perdue.

    Fallait-il le poursuivre quand il était déjà dépassé par l'histoire ?

    Qu'on lui ait permis d'aller finir en paix les quelques mois qui lui restent à vivre après qu'il eût goûté à la prison démocratique (mais n'avait-il pas déjà été longuement prisonnier des nazis ?) est peut-être un acte de justice plus important que l'aurait été sa condamnation.

    Etait-on même certain qu'il aurait eu à subir une condamnation?

    Condamné, il l'était de toutes façons par sa maladie, sans possibilité de nuire désormais, et livré à sa propre conscience.

    Grâce pour un homme auquel seul on ne saurait assimiler un système politique.

    Grâce pour un homme fourvoyé, acculé, raidi dans la décomposition de son Etat.

     

    L'administration stricte de la justice en pâtit peut-être.

    La justice humaine en sort grandie.

    fr. André LENDGER


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  • L'angoisse nous dévore.

    L'angoisse nous étouffe.

                Angoisse des lendemains.

                Angoisse du temps qui passe.

                Angoisse de l'inconnu, imprévisible, impalpable, imaginaire, obsédant.

    Devant l'angoisse tout ce qui paraissait solide et sûr cède, craque, disparaît sans résistance, perd toute importance. De la fumée !

     

    Le monde dans lequel nous vivons favorise l'angoisse :

                - la solitude qui clôt chacun dans son univers particulier, à jamais disjoint de toute relation à l'autre.

                - la sensibilité exacerbée et irritée par l'air du temps, les sollicitations en tout genre, les besoins sans cesse renouvelés, les désirs sans fin.

                - les moyens audio-visuels qui démultiplient les chocs sensibles, gonflent et enflent démesurément l'imaginaire, fascinent et terrorisent.

                - les situations impossibles, sociales ou affectives, dans lesquelles nous nous trouvons projetés à l'envi.

                - l'absence de maîtrise de plus en plus grande sur l'environnement et sur nous-mêmes.

     

    L'angoisse n'est pas une maladie.

                C'est un mal.

    Comme tout mal, elle détruit l'esprit et le corps.

    elle prolifère, s'étend, engloutit la personne.

    Elle est vertige, terreur et attirance du vide et du néant.

    Elle est telle que le seul moyen d'y échapper peut paraître, dans les cas extrêmes, de se jeter dans ses bras et d'y succomber.

     

    L'angoisse est un mirage.

                Elle ne nous fait ni voir ni entrevoir la réalité.

                Elle la tord, la déforme, lui donne des allures de monstre apte à complaire à notre esprit malade et captif.

                Elle nous rend complices d'un monde en voie de désagrégation.

     

    Nous avons l'impression que l'angoisse nous assiège comme une armée ennemie encercle une citadelle par un blocus sans faille. Bientôt les murs tombent et l'armée-angoisse envahit, étreint, tue.

    Mais l'armée-angoisse n'aurait pas pénétré si nous n'avions pas négligé de monter la garde, entrouvert les portes ou laissé un pan de mur à l'abandon,...

    L'angoisse ne dévaste que parce que la place est déjà désertée.

     

    Vaincre l'angoisse, ce n'est pourtant pas construire un mur d'enceinte étanche,

                c'est cultiver et entretenir son champ jour après jour.

                c'est utiliser tous les matériaux possibles pour construire une maison solide, aux portes et aux fenêtres largement ouvertes sur un horizon aussi vaste que possible.

    Les intempéries, les orages, les cyclones et même les tremblements de terre pourront survenir.

    Aussi longtemps que nous serons debout, même dans l'accablement des heures, nous ne nous laisserons pas abattre ni envahir par aucune force étrangère.

    Nous resterons le VEILLEUR.

     

    La fin de l'angoisse, c'est le retour au réel, même s'il parait peu attrayant.

    C'est l'acceptation du combat quotidien non pas pour vaincre des chimères, mais pour faire prendre la vie en nous, bouture qui ne demande qu'à devenir arbre.

    Arroser, sarcler, tailler, pour que s'épanouisse la fleur,

                et que s'enracine l'espérance.

     

    Jésus est notre espérance, notre horizon, notre hôte.

    Il est le sceau du monde réel, jusque dans la dureté inacceptable de la croix.

    fr. André LENDGER


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  • Lutte anti-tabac

    Lutte anti-drogue.

     

    On meurt de l'un comme de l'autre.

    L'un et l'autre sont toxiques et altèrent gravement notre santé en dehors de toute issue fatale.

     

    Cette lutte est destinée à dissuader par la peur.

    Elle a aussi pour conséquence de désigner un responsable simple et visible d'un certain nombre de nos maux.

    On imagine facilement ce que serait, demain, un monde débarrassé du tabac et de la drogue, auxquels il faudra bien ajouter l'alcool.

     

    Le paradis ?

    Ce ne pourrait être qu'un paradis trompeur, aussi artificiel qu'un autre.

    On ne construit pas plus le paradis sur des boucs-émissaires que sur des nuages, des vapeurs ou des flashes.

    La drogue et le tabac ne sont des fléaux que parce qu'ils répondent aux désirs immodérés des consommateurs et aux conditionnements sociaux.

    Il ne suffit pas de les dénoncer.

    Il faut pouvoir infléchir désirs et conditionnements, faute de quoi on aura vite fait de trouver un substitut à ces produits, pas forcément meilleur pour la santé.

     

    Ce substitut n'existe-t-il pas déjà ?

    A étudier les statistiques des suicides, des maladies psychiques ou psychosomatiques, on peut craindre que ne se profile à l'horizon une société où les hommes et les femmes seront livrés aux pires démons de l'instabilité affective et de la déprime.

    L'évolution de la société industrielle, la prolifération non maîtrisée des moyens de communication, l'affadissement de la culture de masse,... pourraient bien nous y préparer.

     

    Les grands fumeurs ou les drogués se laissent-ils entraîner par la publicité ou par leurs blessures psychiques et affectives ?

     

    Fr.André Lendger


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  •  

    La vertu et la politique sont-elles inconciliables ?

     

    Nous avons des raisons de le penser au vu des scandales partout dans le monde.

     

     

     

    La question ne date pas d'aujourd'hui.

     

    Elle se pose cependant avec plus d'acuité :

     

                . l'argent règne aujourd'hui avec une assurance jamais égalée, circule de façon sournoise et s'entasse de façon impudique entre les mains de quelques affairistes quand augmente la pauvreté ambiante.

     

                . la certitude est désormais acquise qu'il n'y a pas de recours : aucun parti politique ne peut prétendre avoir le monopole de la vertu et de l'honnêteté.

     

    Ce qui ne veut pas dire que tous les hommes politiques profitent de leur situation pour s'enrichir personnellement. Ce n'est qu'affaire de personne.

     

     

     

    Aucune société ne peut tolérer de pareilles mœurs sans risquer une décomposition généralisée.

     

     

     

    La corruption est rampante.

     

    Elle vient sous des aspects flatteurs et se revêt des oripeaux du bien commun.

     

    Elle est d'abord tentation.

     

    Elle est liée à la faiblesse humaine, à l'incapacité de l'homme à résister à la séduction de l'argent, sans qu'il y ait volonté perverse ou malhonnêteté fondamentale.

     

    Les justifications ne manquent pas pour se laisser corrompre !

     

    Il faudra pourtant payer-expier pour avoir cédé à la tentation.

     

     

     

    La justice fait son oeuvre et cela nous rassure.

     

                Ne sommes-nous pas rassurés à bon compte ?

     

                Le plaisir éprouvé devant le triomphe de la justice n'est-il pas hypocrite ?

     

                Sommes-nous si sûrs de nous, ignorants de nos propres faiblesses ?

     

    Bien sûr, nous ne nous situons pas au même niveau qu'un ministre ou un affairiste :

     

                . nous nous contentons de grappiller sur nos déclarations d'impôts quand nous le pouvons : "tout le monde le fait", disons-nous pour nous justifier.

     

                . nous recherchons qui pourra nous enlever une contravention.

     

                . nous profitons du travail au noir (pas de TVA) dans nos travaux,...

     

    Ces faiblesses signent notre complicité dans une société où tout se tient.

     

                Nous tentons de nous excuser en disant : "là-haut ils font pire"

     

    Mais là-haut n'est-il pas un miroir grossissant de ce que nous faisons à la base ?

     

     

     

    Nos gouvernants nous représentent et ont une fonction symbolique.

     

    Nous condamnons leurs faux-pas parce qu'ils nous renvoient aux nôtres.

     

    Nous voudrions qu'ils soient ce que nous ne parvenons pas à être : nous sommes corruptibles mais eux devraient être incorruptibles, volages et inconstants dans nos amours mais eux devraient former des couples sans ombre (la cour d'Angleterre), faillibles mais eux devraient être infaillibles.

     

    Nous les établissons en condition de perfection divine (Mitterand-Dieu), quand ce ne sont que des hommes.

     

     

     

    La vertu est nécessaire en politique comme ailleurs.

     

    Mais la vertu dans toute sa rigueur peut être aussi redoutable que l'absence de vertu : au nom de la vertu la tyrannie est vite là qui saura organiser une chasse aux sorcières d'autant plus efficace que les médias se feront un plaisir d'en amplifier les effets : de Platon à Khomeiny en passant par Robespierre, la route de la vertu est tachée de sang.

     

    Ne laissons pas la passion l'emporter sur notre lucidité.

     

    Ne transformons pas les inculpés en boucs-émissaires de nos propres faiblesses.

     

    La corruption commence avec nous, avec le regard que nous portons sur l'argent, avec nos désirs, nos envies, nos rêves, notre soif de toujours-plus par tous les moyens.

     

    La vertu aussi commence , avec nous.

     

     

    fr. André LENDGER,


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  •  

    "Oeil pour oeil, dent pour dent" - "Père, pardonne-leur, ils ne savent ce qu'ils font".

     

     

     

    Le monde dans lequel nous vivons est celui de l'agression.

     

    Agressions que sont le bruit, la pollution, la course contre la montre, les images de la télévision, le stress ambiant,...

     

    Agressions que sont les nécessités économiques, l'instabilité de l'emploi, la volatilité des sentiments, la fugacité des engagements,...

     

     

     

    L'homme contemporain subit et s'irrite.

     

    A l'agression il répond par l'agressivité.

     

    Aux mauvais coups il répond par le désir de vengeance.

     

    Lorsqu'il n'y a pas d'issue, reste la casse-vengeance de ce qu'on a sous la main :

     

                - le cultivateur barre les voies ferrées et les routes

     

                - le marin-pêcheur saccage les marchés

     

                - le lycéen renvoyé moleste son professeur

     

                - l'homme fatigué du tapage tire sur  les adolescents,...

     

    Il n'y a pas à condamner, mais à comprendre celui qui est acculé.

     

     

     

    Les mêmes comportements se retrouvent dans notre vie intime.

     

    Qui ne fait sentir aux autres le poids de ses difficultés personnelles, non seulement par la confidence, mais par le report de l'agressivité sur celui ou celle qui n'y peut mais ?

     

    Combien de disputes familiales ou amicales ne sont-elles pas liées à ce désir naturel de se venger : régler ses comptes, dire à l'autre "sa" vérité, lui renvoyer la balle,...

     

    Parfois même notre vengeance passe par des attitudes plus tortueuses : dépression, suicide, gestes désespérés pour rappeler l'autre à notre existence malheureuse.

     

    Qui ne voit que cette voie est sans issue, nous engage dans une spirale sans fin dont seront victimes les innocents, en particulier les enfants ?

     

     

     

    Le pardon seul peut être opposé à ces dérives.

     

    Pardon : tout le contraire d'une reddition.

     

    Pardon : parce que je suis aussi pécheur que l'autre, même si je ne vois pas.

     

    Pardon : parce que, même si j'ai raison dans mon interprétation du mal que me fait l'autre et dans l'analyse de son comportement, ma vengeance ne changera rien : elle ne sera  qu'un soulagement temporaire, un exutoire qui ne videra pas l'abcès.

     

    Pardonner : c'est entrer dans le mystère de l'autre : il me fait mal parce qu'il souffre.

     

    Pardonner : c'est reconnaître que l'autre n'est que ce qu'il est et que moi je ne suis que ce que je suis.

     

    Pardonner : c'est accepter d'être perdant aux yeux du monde et de ses raisons.

     

     

     

    Le pardon n'est complet que si l'autre accepte d'être pardonné, s'il entre à son tour dans cette voie de paix et de mystère de l'être humain.

     

    Mais l'autre c'est moi.

     

    Est-ce que j'accepte qu'on me pardonne, c'est-à-dire est-ce que j'accepte de me reconnaître coupable aux yeux de l'autre, même si cette culpabilité m'échappe ?

     

    Je ne peux pardonner que dans la mesure où je me laisse pardonner.

     

     

     

    Ne rêvons pas, ce ne sera pas la fin de nos difficultés, parfois insurmontables.

     

    Du moins pourrons-nous les affronter sans détour ni faux-fuyant.

     

    Tel est le chemin de l'homme face à son destin, chemin de crête sur lequel, même si tous les problèmes ne sont pas résolus, les personnes s'accomplissent dans leur vérité.

     

     

     

    Qui ne voit que cette même attitude a des résonances sociales ?

     

    C'est la voie du dialogue, de la reconnaissance mutuelle, de la décision de regarder ensemble et en face les problèmes, même s'ils paraissent insolubles.

     

     

     

    Les conflits, pierre d'achoppement de nos choix humains.

    fr. André LENDGER


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