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    L'ONU a-t-elle failli à sa tâche en Bosnie ?

     

    La prise en otages de soldats onusiens pourrait nous le faire croire.

     

    Tant d'hésitations, de reculs, de vaine diplomatie ont discrédité l'ONU, chaque fois dépassée par des défis pourtant prévisibles. Que d'occasions manquées !

     

    Impuissance, faiblesse, manque de fermeté.

     

     

     

    Qu'est-ce que la fermeté, sinon frapper, détruire, tuer ?

     

    L'ONU a choisi une voie infiniment plus étroite :

     

                - s'interposer entre les belligérants pour éviter les massacres,

     

                - éviter l'extermination, le génocide, la loi du plus fort et du plus cynique,

     

                - nourrir des populations menacées de famine et abandonnées sans soins.

     

    Un tel choix rendait l'ONU vulnérable aux entreprises du plus cynique et du plus fort.

     

     

     

    L'ONU a fait le pari a priori insensé d'envoyer des troupes, non pas pour se battre, mais pour être à l'affût de la paix et à son service , une vocation nouvelle pour une armée.

     

    A charge pour les politiques et les diplomates de trouver les conditions honorables de cette paix pour les trois parties concernées.

     

    Les sanctions étant inexistantes, les condamnations sont restées paroles en l'air, les résolutions de l'ONU ont été piétinées et le contingent onusien est devenu un hochet.

     

    L'exercice était inscrit dans les limites que s'était imposée l'ONU.

     

    Il eût fallu que les protagonistes fussent très vertueux pour qu'il en aille autrement !

     

     

     

    Echec ou grandeur ?

     

    L'ONU, de propos délibéré, n'a pas voulu faire la guerre.

     

    Elle a refusé d'entrer dans le cercle de la violence et de la mort, même aux dépens de l'agresseur.

     

    Elle a refusé de faire la guerre pour obtenir la paix.

     

    Elle a voulu ramener les hommes à la raison par la diplomatie.

     

    Contre toute raison et toute espérance, elle a espéré en la sagesse des hommes.

     

    Son arme a été celle de la conscience.

     

    Ce pari,  même s'il se révèle inopérant, est un véritable acte de foi en l'homme.

     

     

     

    L'impuissance avérée de l'ONU montre à quel point la paix est difficile et combien étroite et malaisée est sa voie. La paix en Bosnie. Toute paix.

     

    Cela ne devrait pas nous étonner. Cela confirme les difficultés que chacun de nous rencontre pour faire la paix. En lui, autour de lui, dans sa famille, dans sa société.

     

    Une force d'interposition serait souvent nécessaire pour ramener la paix en nos murs. Mais nous savons qu'elle se heurterait, tout comme l'autre, aux passions et aux refus de dialogue, l'épreuve de force étant une solution plus facile, plus séduisante et plus satisfaisante que tous les efforts de réconciliation et de paix.

     

     

     

    Peut-on imposer la paix ?

     

    C'est la contradiction même.

     

    La paix ne saurait s'imposer. Elle se reçoit comme un don ou elle n'existe pas.

     

    Toute oeuvre de paix est vouée à l'échec dès lors que, dans une situation donnée,  seule la force est finalement en mesure de ramener l'agresseur à la raison.

     

    Entre temps celui-ci aura eu tout le loisir de montrer jusqu'où pouvait aller le cynisme et la barbarie de l'homme. De cela, l'histoire ne manque pas d'exemples !

     

     

     

    Alors que tout le monde garde les yeux tournés vers les otages onusiens des serbes, l'enjeu est infiniment plus important que leur libération, si nécessaire soit-elle :

     

                - les hommes seront-ils capables, un jour, de faire advenir la paix ?

     

                - les hommes sauront-ils, face à la destruction, la violence et la mort, répondre autrement que par la destruction, la violence et la mort (la vengeance) ?

     

    L'aventure onusienne en Bosnie, si mal engagée et si dépendante de la légèreté des hommes soit-elle, est un épisode, et non des moindres, de la tentative des hommes, pleins d'une bonne volonté même molle et incertaine, d'oser les mésaventures de la paix.

     

    Dérisoire par l'addition de ses inconséquences, elle est pourtant

     

    Essentielle.

     

    Jésus a déjà fait l'expérience du paradoxe de la paix

     

    Homme de paix, il l'a promise , mais "pas telle que le monde la donne"...

     

    Pour ce faire, de mort violente Il est mort

    fr. André LENDGER


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    Le 15 Mai, Cédric Camara, âgé de 4 ans, disparaissait

     

    Le 25 Mai, son frère aîné, Aboubakar, âgé de 14 ans, reconnaissait l'avoir jeté dans le canal du Rove, à Marignane, près de Marseille.

     

     

     

    Le jeune adolescent aurait voulu, par son geste, obtenir le droit de retourner vivre chez ses grands-parents qui l'avaient élevé.

     

    Le motif invoqué parat hors de proportion avec la gravité du délit.

     

    Comment cet enfant a-t-il pu en arriver à tuer son frère ?

     

     

     

    On évoquera, sans grand risque de se tromper, la fragilité du meurtrier.

     

    Banal, le fait mérite pourtant d'être souligné alors qu'on fait de plus en plus allusion aux facultés d'adaptation des enfants aux situations déroutantes que leur font vivre les adultes : divorces, remariages, décomposition et recomposition des familles avec des demi-frères, des demi-sœurs, et des enfants d'un autre ménage, complètement étrangers.

     

    Tous les enfants ne se prêtent cependant pas à ce genre d'adaptation.

     

    On peut imaginer que les parents d'Aboubakar aimaient leur enfant et qu'ils s'en sont sentis responsables, puisqu'ils l'ont "repris".

     

    A priori ils ont bien fait : ce retour au sein de la famille naturelle est ce que préconisent le plus souvent les organismes sociaux - sauf cas exceptionnels.

     

    Pourquoi les parents d'Aboubakar n'auraient-il pas espéré que les difficultés rencontrées avec leur enfant s'estomperaient avec le temps ?

     

    Mais celui-ci n'a pas supporté de passer de ses grands-parents à ses parents.

     

    Il serait pourtant imprudent de penser qu'il n'aimait pas ses parents ou qu'il était simplement jaloux de son petit frère ("contre lequel il n'avait rien", a-t-il dit).

     

    Peut-être avait-il le désir de se faire aimer d'une façon impossible.

     

    Geste de désespoir, de souffrance et d'une détresse insupportable.

     

     

     

    Une série de questions ne peut que découler de cette première interrogation.

     

    Tuer son petit frère, quel qu'ait été son désespoir personnel apparaît, au premier regard, comme une folie.Celui-ci était faible et sans résistance, et il faisait confiance.

     

    Comment Aboubakar a-t-il pu croire que la disparition de son petit frère lui permettrait de réintégrer le foyer de ses grands-parents ?

     

    Quel obstacle imaginaire son petit frèrereprésentait-il pour lui ?

     

    Tuer son petit frère, n'était-ce pas une façon de procéder à sa propre mise à mort par personne interposée ? N'était-ce pas un acte suicidaire, retardé ou anticipé ?

     

    La rupture avec ses grands-parents équivalait à une mort pour lui. Il ne pourrait rejoindre leur paradis perdu que par la mort, d'abord celle d'un autre, offert en sacrifice par un geste fatal enraciné dans l'inconscient. Mais déjà c'était sa propre mort qu'il projetait, car c'est à sa mort seule que pouvait le conduire, à terme, son acte.

     

    La nostalgie des années passées auprès de ses grands-parents n'exprimait-elle pas son incapacité à assumer le présent et à affronter l'avenir leur préférant la mort ?

     

     

     

    Son frère, au moment où il l'a jeté à l'eau, était-il encore son frère dans son cœur ?

     

    Ne l'avait-il pas déjà réduit à l'état d'objet obstacle victime sacrificielle ?

     

    En le jetant à l'eau, il a voulu se libérer d'un poids et d'une entrave.

     

    Il a refusé de reconnaître dans son frère ce qu'il était vraiment, un enfant semblable à lui, de même sang et de même dignité que lui .

     

    Moment d'égarement fatal où peut-être des images ont traversé sa tête, flashes d'hommes et d'enfants morts, simples objets et pantins sans importance. Des images.

     

     

     

    La mort est devenue banale et l'âge des assassins ne cesse de s'abaisser.

     

    Les jeunes ne sont pourtant pas à priori pires que leurs aînés. Mais leur vie est plus difficile, leur affectivité est soumise à plus rude épreuve et le monde contemporain leur offre un avenir peu attrayant.

     

    Que des enfants deviennent assassins, délinquants, ou se suicident, ces questions renvoient les adultes à eux-mêmes, car ce sont eux qui créent les conditions de développement de leurs enfants.

     

    Quelle éducation ? Quel sens de l'autre

     

    Les hyperprotéger ou leur faire croire que tout leur est dû est une erreur. Les projeter dans l'épreuve sans tenir compte de leur fragilité en est une autre .

     

    Les préparer à affronter les frustrations de la vie et les aider à acquérir le sens de l'autre, de sa valeur unique et de l'amour qui lui est dû, est difficile. C'est la seule voie .

    fr. André LENDGER


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  • Karane-Ivato. Mururoa. Bosnie.

     

    Des événements apparemment étrangers les uns aux autres.

    Des événements dont chacun enseigne quelque chose sur l'homme.

     

    En Bosnie on se bat. Une action humanitaire de protection, d'alimentation et de soins des populations civiles a été mise en place par l'ONU. Elle se voit dénier toute efficacité parce que l'agresseur s'en moque et ridiculise la force de paix.

     

    A Mururoa se préparent des essais nucléaires pour moderniser la force française de dissuasion. Toute une cohorte de bateaux pacifistes et écologistes veulent leur faire échec. De toutes façons ces essais auront lieu.

     

    Tout près de La Réunion vit, dans une grande pauvreté, le peuple malgache qu'aucune guerre ne menace. L'aide internationale, par le biais des organismes tels que le FMI ou la Banque Mondiale, tarde à venir. Seuls des bénévoles et des associations privées contribuent, avec quelque efficacité, à aider le pays à sortir de sa ruine.

     

    Ces trois combats peuvent ne paraître que différents, chaque personne pouvant faire une analyse différente de chacun d'entre eux. Chacun pourtant s'accorde à dire que :

    - l'impuissance spectaculaire de l'Occident et de l'ONU en Bosnie fait honte.

    - la flottille pacifiste qui croise aux alentours des atolls de Mururoa et de Fangataufa apparaît dérisoire, tant l'enjeu bosniaque l'emporte en urgence immédiate.

    - les aides multiples accordées à Madagascar ne permettent pas d'espérer que demain le pays sera sorti de son ornière.

     

    Si différents soient-ils, voire peut-être si opposés nous apparaissent-ils, ces trois combats - et bien d'autres - n'ont qu'une ambition : sauver des hommes, des femmes, des enfants et des vieillards. Ceux de cette génération, mais aussi ceux des générations à venir. Comment donner à l'homme les moyens de vivre sans peur aujourd'hui et demain ?

    Quelles que soient nos divergences légitimes, chacune de ces opérations situe l'homme dans son défi contre les forces de la mort. Elle appelle une éthique.

    Le combat est et sera toujours inégal, car les forces de mort ont pour elles l'efficacité de la technique, l'ivresse que procure la puissance et la mise en oeuvre d'une rationalité froide vidée de toute sensibilité.

     

    Les défenseurs de l'homme, au cœur de ces combats, ressemblent parfois à quelque Don Quichotte chevaleresque.

    Lequel ignore la limite de son action, même s'il est en mesure de mobiliser quelques dizaines d'associations, de voiliers ou de troupes au prix d'innombrables risques, efforts, souffrances, épreuves, don de soi-même ?

    Les résultats des humanitaires sont souvent piètres, car ils ne peuvent pas pallier à l'inefficacité des politiques qui seuls ont les moyens d'agir au fond.

    Qui peut se targuer d'avoir sauvé qui ? Que veut dire "sauver" ? Où commence le salut ? La santé ? Le cœur ? Pour combien de temps ?

     

    Là pourtant - dans cette interrogation, dans cette incertitude, dans l'insatisfaction d'une réponse claire - réside la grandeur de homme dans son projet de rejeter au loin l'ombre de la mort.

    L'accident de Karane nous le rappelle : ces hommes et ces femmes ont travaillé dans la discrétion, la gratuité et l'enthousiasme. Ils ont réconforté, serait-ce un moment, leur frère dans le malheur.

    On ne parle d'eux qu'au détour d'un drame ? Ils sont notre honneur.

     

    Alors que trop souvent nous faisons état de notre impuissance face aux grands drames mondiaux, les victimes de Karane viennent opportunément nous rappeler qu'il est possible d'agir et de remporter des victoire pour l'homme, en conjuguant nos forces, sans tapage.  Le pauvre, l'autre, est à nos portes, à notre portée. Il nous attend.

    Agir où nous sommes, comme nous sommes, avec nos petits moyens.

    Pour sauver l'honneur et l'image de l'homme

    fr. André LENDGER


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    "La Haine".Un film, un sentiment.

     

     

     

    Le film, c'est l'histoire de trois jeunes gens d'origine différente, un juif, un beur et un noir. Tous trois habitent la banlieue parisienne.

     

    Comme tous les jeunes de leur génération, avec le handicap supplémentaire de leur origine, ils sont aux prises avec l'absence de perspective et de projet. Leur vie ne débouche sur rien et ils tournent en rond, désœuvrés, dans leur quartier.

     

    Ils ont eu des difficultés scolaires et ils connaissent des problèmes de famille.

     

    Ils vivent au contact de la drogue et de la délinquance, sans être de vrais drogués ni de redoutables délinquants. Mais drogue et délinquance font partie de leur environnement immédiat, au même titre que les hautes barres des immeubles qu'ils habitent et qui les enserrent.

     

    Ce sont des êtres de la frange et il faudra peu de chose pour que leur destin bascule dans un sens plutôt que dans un autre.

     

    Hasard ou destin ?

     

    Le film a ses limites et la situation de ces trois enfants d'immigrés est typiquement métropolitaine et européenne.

     

    Mais les relations entre police et jeunes marginaux n'ont pas de frontière.

     

     

     

    La haine.

     

    Le film nous découvre le mal-être de ces jeunes plus que la haine qui les habite.

     

    Ils sont aux prises avec des situations qui leur échappent.

     

    Mais la haine est là, tapie, qui déferlera après le film... à son début !

     

     

     

    Un épisode projette une lumière particulière sur le film.

     

    Les trois jeunes sortent du Quai des Orfèvres. Un policier les salue, leur dit "monsieur" et les vouvoie. Etonnement, surprise, émerveillement.

     

     Il existe donc des "flics" humains, polis, qui vous respectent, reconnaissent en vous autre chose qu'un délinquant et ne cherchent pas à vous taper dessus ou à vous considérer comme une chose, un déchet.

     

    La scène est fugitive, mais le visage étonné et illuminé du jeune beur montre que nous effleurons là une question centrale, celle du rapport entre les hommes.

     

    Ces jeunes sont en quête d'une place et d'une identité.

     

    Ils ont besoin d'exister aux yeux des autres.

     

    Un jeune policier beur leur dit : "la police est là aussi pour les défendre".

     

    On se met à réfléchir aux rapports que la police, dans de nombreux secteurs de banlieue, cherche à établir avec les jeunes, organisant des loisirs et des matches...

     

    Mais il suffit d'un geste de trop d'un côté ou de l'autre, d'un excès de provocation ou d'un excès de zèle, d'une "bavure", pour que tout soit remis en question.

     

    Mais qui est en mesure de garder toujours la tête froide ?

     

     

     

    La haine est voisine de l'amour.

     

    On ne hait vraiment que ceux dont on est proche, ceux qu'on voudrait aimer ou dont on voudrait être aimé.

     

    La haine est le fruit de l'amour et de la désillusion.

     

     

     

    Le monde dangereux dans lequel nous vivons est traversé par des haines multiples.

     

    Les nations, les ethnies, les confessions religieuses, les personnes mêmes, attisent les haines les unes contre les autres, dans l'illusion que cela leur permettra d'exister.

     

    Espoir vain, car la haine engendre une violence qui ne permet de "se faire respecter" que de la façon la moins humaine qui soit, la terreur.

     

    Au terme, toute réconciliation est impossible.

     

     

     

    Seuls le pardon et le respect peuvent faire échec à la montée de la haine.

     

    Seule une police dont on est assuré qu'elle recherche le bonheur des citoyens, quels qu'ils soient, dans la justice, peut acheminer vers la paix.

     

    Seules des familles cohérentes et solides peuvent éduquer des enfants accueillants et sans haine puisqu'ils sont aimés.

     

    Seules des spiritualités habitées par l'amour, cherchant la réconciliation entre les hommes de bonne volonté, peuvent libérer de la peur et de la haine.

     

    La haine est homicide.

     

    Mais détruisant l'image et la présence de Dieu dans l'homme, elle est aussi déicide

    fr. André LENDGER


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    Il y a 50 ans, Hiroshima. Victoire, défaite et question.

     

     

     

    Victoire militaire puisque l'explosion allait être suivie de l'arrêt des hostilités entre les Etats-Unis et le Japon, marquant la fin de la deuxième guerre mondiale.

     

    Victoire scientifique dans la connaissance et la maîtrise de la matière.

     

    Victoire collective d'une communauté de savants qui ont uni leurs forces pour parvenir à la libération de la puissance enfouie dans l'atome.

     

     

     

    Victoire aux airs de défaite devant le gigantisme de la destruction.

     

    Victoire aux airs de défaite quand la première utilisation de la puissance de l'atome a été mise au service de la guerre et de la mort.

     

    Victoire aux airs de défaite puisqu'elle a engendré une peur qui ne cessera plus.

     

    Victoire qui laisse augurer la possibilité d'une apocalypse déclenchée non pas sur ordre de Dieu pour asseoir Son règne de Paix, mais par la volonté des hommes pour anéantir l'humanité et la plonger dans la mort éternelle.

     

     

     

    D'autres horreurs avaient ponctué la dernière guerre plus qu'aucune autre auparavant, si sanglantes avaient-elles été.

     

    Les camps de déportation ont fait infiniment plus de victimes que les deux bombes lancées sur Hiroshima et Nagasaki.

     

    Ils ont été le signe de la barbarie, de la perversité et du sadisme de l'idéologie nazie, le triomphe de ce qu'il y a de plus ténébreux dans l'homme.

     

    L'arme atomique rend pourtant anachroniques et artisanales les méthodes nazies.

     

    Le froid calcul politique et technique suffit aujourd'hui, même si nous pouvons faire confiance à l'homme pour trouver d'autres terres d'élection pour satisfaire sa barbarie.

     

     

     

    L'arme atomique introduit un nouvel équilibre mondial, celui de la terreur.

     

    C'est une question grave, car cette terreur est l'œuvre d'une démocratie.

     

     

     

    Peut-on porter un jugement moral dénué de passion sur l'arme atomique ?

     

    L'arme atomique est-elle moins morale qu'une autre arme en raison de sa seule puissance de destruction et des dangers qu'elle fait courir à l'humanité ?

     

    Elle est faite pour tuer comme toutes les autres armes, et sa moralité repose moins sur son pouvoir plus ou moins grand de provoquer la mort que dans l'usage qu'on en fait.

     

    L'arme atomique serait-elle immorale parce qu'elle menace des civils innocents ? Mais les soldats sont-ils tous volontaires ? Ne sont-ils pas, eux aussi, victimes innocentes de ceux qui prennent les décisions politiques et les envoient sur les champs de bataille ?

     

    La moralité - ou l'immoralité - de l'arme atomique veut que, étant donnée la menace qu'elle représente pour la survie de l'homme, elle ne doit jamais être utilisée.

     

    Mais qui nous assure, puisqu'elle existe, qu'un homme ne l'utilisera pas un jour ? Les tyrans ne s'embarrassent pas souvent de morale !

     

    L'arme atomique a eu, dans les cinquante dernières années, la vertu d'éviter les conflits généralisés, et de limiter dans l'espace les guerres dites "conventionnelles".

     

    La peur a engendré la prudence.

     

    Mais la peur sera-t-elle suffisante pour maintenir éternellement une paix précaire ?

     

    La paix peut-elle n'être que le fruit de la peur ?

     

     

     

    C'est là que la morale rejoint la bombe atomique :

     

                - tout homme, tout citoyen, et très spécialement les hommes politiques, est appelé à la

     

    vigilance concernant de telles armes

     

                - tout homme, tout peuple, est appelé à élire des hommes politiques responsables. Mais quel pays, démocratique aujourd'hui, est à l'abri d'un dictateur ?

     

     

     

    Il est moins important de porter un jugement moral sur l'arme atomique que d'y voir

     

                - le signe d'un naufrage possible de l'humanité

     

                - l'appel  une gestion paisible des difficultés et des conflits entre pays.

     

     

     

    Si nous voulons que la sagesse l'emporte entre les peuples, ne faut-il pas qu'elle l'emporte d'abord en nous, dans nos pays, dans nos familles, dans nos cœurs ?

    fr. André LENDGER


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