• 7 juin 1998 - L’épreuve.

    L’épreuve.

    Le sort commun de tout homme est de traverser des épreuves.

    Elles peuvent être constitutives de la personne, handicaps physiques ou psychologiques dès la naissance, ou survenir dans le cours de la vie : altération grave de la santé, maladies incurables, échecs dans le ménage, problèmes graves avec les enfants…

    Certains, dépassés et submergés par l’épreuve, entrent en dépression et peuvent aller jusqu’au suicide ; d’autres essaient de trouver un réconfort dans la prière…

     

    L’épreuve nous sollicite à prouver notre capacité à vivre l’insoutenable, à lui faire face, à affirmer la grandeur de l’homme quand tout nous invite à renoncer et à régresser.

    On ne peut que s’interroger sur la signification des épreuves. Elles constituent un non-sens, une absurdité monstrueuse. Pourquoi ? et il n’y a pas de réponse.

    Puisque pour les croyants, rien n’advient sans que Dieu soit présent à ce qui se passe, la question rejaillit sur le créateur : comment peut-il permettre de telles souffrances ?

    La mort de Jésus est la réponse de Dieu. Sur la croix, Dieu a partagé nos épreuves en entrant lui-même dans l’épreuve. Par elle, il a donné la preuve de son amour et l’assurance que la mort est pour la vie. L’épreuve, en lui, nous invite à une espérance contre toute espérance.

     Le corps de Jésus ressuscité porte les marques de son martyre pour l’éternité. Il témoigne que l’amour parfait qui unit le Fils au Père et à l’Esprit est traversé par l’épreuve.

    Tout amour est donc menacé par l’épreuve, même l’amour de celui qui n’est qu’Amour. L’épreuve partagée par Dieu est, comme la nôtre, une insulte à  la raison. C’est pourquoi saint Paul appelle la Croix de Jésus une folie et un scandale. Ainsi de nos épreuves.

     

    L’épreuve est souffrance et déchirement. On ne peut y échapper.

    Il existe des personnes qui reçoivent l’épreuve comme une grâce. Est-ce le signe d’une foi plus grande ou d’une réaction affective différente ? La tradition chrétienne nous présente Marie pleurant au pied de la croix, comme toute autre mère en pareille circonstance. L’épreuve est un glaive qui déchire la chair et l’esprit.

    Toute épreuve nous confronte à l’irruption du mal dans notre vie. Elle accompagne le plus souvent des situations humaines irréversibles. L’essentiel est de savoir comment nous ressortirons de l’épreuve, sachant que nous ne serons plus comme nous étions avant d’y entrer. Nous aurons traversé un bain de détresse, d’approfondissement et de purification intérieure.

     

    Quelle que soit l’épreuve, elle provoque à une réaction.

    Ce que nous n’avions pas prévu ou pas voulu prévoir – cela n’arrive qu’aux autres – nous frappe dans sa soudaineté. Des sentiments qu’on croyait oubliés, des événements heureux ou malheureux mais chéris, des regrets se réveillent. Des culpabilités qu’on ne soupçonnait pas, le plus souvent injustifiées, viennent au jour. Toute une vie s’écroule, avec ses projets, ses espérances et ses rêves. C’est le retour à la dure réalité.

    Pourtant la vie continue, amputée certes, mais plus insistante que l’épreuve. Rien, pas même la volonté d’en finir avec elle, ne peut l’arrêter.

    L’épreuve change alors de sens.

    Elle n’est pas pour la mort, mais dans la vie et pour la vie. Il ne sert à rien de la ruminer et de la retourner sans cesse en nous. Elle est un appel à la dépasser pour donner toute sa chance à la vie. Elle est, si nous savons la regarder, une invitation à la vie.

    Un nouvel équilibre s’établira dans notre existence, avec sa blessure.

    La souffrance persistera, mais notre vie se construira désormais dans la vérité.

    La vie est au prix de l’épreuve qui ne saurait nous épargner.

    Nous saurons que la vie est d’autant plus précieuse que partout menacée. Elle a besoin de toute notre sollicitude. Elle nous convie à l’aimer au moment même où elle perd toute saveur et où le goût amer de l’épreuve emplit encore notre bouche. La mort ne prévaudra pas.

    Ayant traversé l’épreuve, nous serons solidaires de tous ceux qui en restent écrasés.

     

    Aguerris par l’épreuve, porteurs des marques de notre propre malheur comme Jésus de ses plaies, nous entrerons dans la vie, si nous ne démissionnons pas, plus forts pour engager le combat. Nous faisant passer du désespoir à l’espérance, nos épreuves témoigneront de la grandeur de l’homme capable de faire surgir la vie de la mort.

    Fr. André Lendger,

    « 31 mai 1998 - Les enfants-esclaves.14 juin 1998 - «Dis-moi qui est ton Dieu, je te dirai qui tu es.» »

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