• 31 mai 1998 - Les enfants-esclaves.

    Les enfants-esclaves.

    Leur petite cohorte internationale vient d’arriver en métropole.

    Elle attire une fois de plus l’attention de nos contemporains sur le monde de l’enfance.

     

    « L’enfant est roi », a-t-on souvent entendu dire.

    Cela est vrai dans un grand nombre de sociétés développées où les enfants sont l’objet de toutes les attentions, au moins apparentes.

    Dès leur naissance beaucoup d’enfants de nos pays riches ont été habitués à recevoir non seulement le nécessaire, mais le superflu. Les magasins regorgent de tout ce qui peut amuser, distraire, habiller, nourrir, parfumer, endormir le bébé, puis le petit garçon et la petite fille, ainsi de suite jusqu’à ce qu’ils soient assez grands pour s’installer eux-mêmes dans le monde de la consommation et de la surconsommation. Que les objets s’abîment ou se cassent, peu importe, ils seront remplacés pour que l’enfant ne pleure pas.

    Enfant-roi ou enfant-objet ?

    Derrière cette belle façade se cachent parfois la démission de parents qui substituent des gadgets à l’environnement affectif dont a d’abord besoin l’enfant.

    L’enfant-roi peut être un enfant qui a tout, sauf l’essentiel.

    Il a été gavé d’objets parce qu’on le considérait lui-même comme un objet, parfois sottement hissé sur un piédestal par les parents, parfois délaissé comme gênant et encombrant

    Il ne restera plus à l’enfant qui a grandi sans avoir été aimé qu’à prendre un fusil et à tirer dans le tas, dans un geste de désespoir démentiel, comme cela se voit de temps en temps.

     

    Objet aussi l’enfant que la nécessité économique pousse à la prostitution.

    Il n’est plus simplement oublié, délaissé parce que gênant. Il est devenu un simple objet de consommation dans le grand supermarché des satisfactions sexuelles.

    Il ne s’agit plus de faiblesses comme en connaisent ceux qui emplissent nos prisons.

    Il s’agit d’une attitude beaucoup plus grave et lourde de conséquences - quoique rarement punie - non seulement pour l’enfant, mais pour l’humanité : il s’agit du regard porté sur l’enfance et finalement sur l’homme : la vision qu’on a de l’autre est déviée, dévoyée. L’autre –et même le Tout-Autre – n’est considéré qu’en fonction de la satisfaction qu’il procure.

    Une société peut-elle survivre à un tel regard porté sur le plus faible et le plus démuni ?

     

    Mais la procession des enfants-esclaves nous fait descendre plus bas encore dans le traitement réservé aux enfants par les adultes contemporains.

    Ne parlons pas des excès de quelques déments, mais de ce qui est organisé, rationalisé.

    L’enfant n’est plus seulement un objet de consommation source de plaisir, il devient un outil de production entre les mains de quelques personnes qui s’enrichissent sur son dos.

    Enchaîné, l’enfant remplace la machine sans autre frais qu’une maigre pitance.

    Privé de toute liberté, enfermé, affamé, il est rivé au service de quelques personnes habituées à s’enrichir aux dépens d’autrui.

    L’utilisation sexuelle de l’enfant-esclave ne vient qu’en complément de tout cela.

     

    Il est heureux qu’en cette année où l’humanité riche se souvient qu’elle tient une partie de sa richesse de l’esclavage dans lequel elle a réduit un grand nombre d’hommes, de femmes et d’enfants, nous ouvrions nos yeux sur l’esclavage contemporain qui frappe principalement ceux qui ont le moins de défense, ceux qui représentent notre avenir, les enfants.

    Des parents eux-mêmes n’en sont-ils pas réduits à vendre leurs enfants pour survivre ?

    Il est temps de voir que, cette fois encore, ce sont les lois économiques, celles du marché, qui favorisent ce nouvel esclavage, à savoir la misère dans laquelle est plongée une grande partie de peuples dits du « sud » et la nécessité d’offrir les produits au plus bas prix.

    Lorsque nous achetons certains objets de valeur à des prix défiant toute concurrence, il y a des chances qu’ils aient été fabriqués à l’aide de cette main-d’œuvre d’enfants-esclaves.

    Devrions-nous ne pas acheter ?

    La solution ne réside sans doute pas dans l’abstention, mais bien plutôt dans une lutte acharnée contre toute forme d’esclavage à l’échelle internationale.

    Les prix monteront ?

    Personne n’est obligé d’acheter le superflu !

    Fr. André LENDGER

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