• 26 janvier 2003 Le français et la francophonie.

    La langue est un facteur éminent d’appartenance à une communauté humaine. Elle a sa logique intérieure et elle façonne les esprits en fonction de son génie. Cela rend les traductions souvent difficiles, spécialement dans le domaine de la poésie : le sens des mots ne se recouvre jamais totalement d’une langue à l’autre, la construction de la phrase est différente, le rythme général et la musique des mots (l’âme de la langue) demeurent uniques.

    Chaque nation a, au cours des temps, forgé sa propre langue qui est un élément d’échange, un signe d’unité et la base d’une culture qui devient le bien commun de l’ensemble de ceux qui la parlent. Le même phénomène se reproduit à l’échelle des langues régionales : elles sont le témoin d’une identité et d’une richesse originales qu’il serait regrettable de faire disparaître au bénéfice d’une unique langue nationale. Certains vont jusqu’à proposer une unique langue mondiale : ce serait un appauvrissement culturel dramatique pour l’humanité.

    Il est des langues qui, pour répondre aux nécessités des échanges entre les nations, parce qu’elles y sont adaptées et sont le fait d’un peuple dominant à une certaine époque, deviennent des langues internationales. C’est aujourd’hui le cas de l’anglais et même de l’espagnol ; ce fut le cas du français pour la diplomatie et la culture pendant plusieurs siècles. Il est heureux que chaque langue apporte sa note dans le concert culturel de l’humanité.

     

    C’est un honneur et un facteur important de développement culturel qu’une langue nationale accède au rang de langue internationale et qu’elle dépasse les frontières d’un Etat. C’est aussi une responsabilité. Lorsque le statut international de cette langue est menacé, cela crée des devoirs et exige une politique non pas claironnante, mais intelligente et courageuse.

    Qui vont être les ambassadeurs d’une langue ? les étudiants venus de pays étrangers, les savants, les industriels que leur compétence fera appeler dans d’autres pays et qui, auprès de quelques cadres ou travailleurs, contribueront à faire estimer nos réalisations et notre culture, les penseurs, les écrivains et les artistes (livres, films, médias, chant, poésie…).

    La France a une responsabilité à l’égard des pays francophones.  A quoi servirait en effet la Francophonie dont on nous parle tant si elle n’était l’occasion de rencontres entre responsables mais aussi entre intellectuels et entre populations qui, dans une même langue, peuvent se fréquenter et apprendre à se connaître dans leurs différences. Car notre langue vit ailleurs et autrement, mais partout elle garde sa richesse, sa finesse, la précision de sa pensée concrète ou abstraite. Quel rôle ne pourrait-elle jouer dans le contexte international actuel !

     

    Or nous sommes loin du compte. Certes actuellement la France parle d’une voix haute dans les instances internationales. Elle a son propre discours et elle demeure une puissance non négligeable, ce qui est une condition pour qu’une langue exerce un attrait autre que touristique. Une langue qui prétend être autre chose qu’un véhicule commercial  ne peut en effet espérer se répandre que si elle se recommande par la qualité de la pensée qu’elle transmet, par l’humanisme qu’elle propose, par sa capacité à permettre un dialogue concis.

    Cela veut dire qu’il est des domaines où les pouvoirs politiques doivent agir pour que le français continue d’être une langue internationale. La première action consisterait à soutenir la production d’articles suffisamment importants dans tous les domaines pour qu’il devienne nécessaire que des étrangers se familiarisent avec notre langue afin d’en comprendre les nuances, spécialement dans le domaine des sciences humaines. Or il est notoire que la France régresse dans les publications et les brevets, et les crédits alloués au CNRS sont en chute libre.

    Une autre piste s’offrirait, riche d’avenir, ce serait l’accueil d’étudiants étrangers, ceux qui ne parlent pas encore notre langue, mais aussi ceux qui sont originaires de nos anciennes colonies, pour lesquels le français est langue nationale. Or si l’on s’en réfère aux pratiques locales, spécialement à celles qui ont cours à Madagascar, on ne peut que se poser des questions : les visas de longue durée (nécessaires pour suivre des études) sont délivrés au compte-gouttes, quand ils le sont ! Même les religieux et religieuses se voient refuser leurs visas, qui pour faire un noviciat, qui pour faire des études de théologie. Ne parlons pas des jeunes qui désirent venir chez nous accomplir un cycle d’études. Après les errements de la politique française lors de la crise malgache, faut-il attendre que ce pays, découragé, bascule à son tour dans l’anglophonie, langue, culture mais aussi économie et politique ? Ne serait-il pas opportun même de lui envoyer sans tarder des professeurs pour y enseigner le français ?

    Sommes-nous résignés à laisser dépérir le rayonnement de notre langue ?

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