• 24 juillet 2004 Minorités.

    En toute structure sociale un peu large se rencontrent des minorités. Les minorités sont
    définies le plus souvent en fonction de critères extérieurs objectifs et repérables. Les membres
    appartenant à ces minorités sont plus ou moins bien tolérés en fonction des circonstances et de l'état
    d'esprit des majoritaires. En dépit des protestations d'égalité et de la reconnaissance de leurs droits, les
    minoritaires savent que leur statut demeure fragile. Les vieux démons, qui avaient été exorcisés,
    peuvent se réveiller et réduire à néant des progrès qu'on croyait acquis. Les majoritaires agissent .
    comme s'ils avaient besoin d'antagonistes, car exister-contre est plus comblant qu'exister tout court.

    La couleur de la peau, la culture de référence, l'origine ethnique, les orientations sexuelles,
    sont autant de critères qui permettent de désigner les minorités. Il peut en exister d'autres; ceux-ci
    sont les plus tenaces. Un seul de ces critères peut suffire, mais ceux-ci peuvent évidemment
    s'additionner. Lorsqu'il s'agit de rejeter, de repousser les indésirables dans les régions extérieures de
    la bonne société, on n'est jamais en reste d'imagination méprisante. Or les minoritaires sont des
    personnes qui ne peuvent rien à leur état. Ils sont nés minoritaires et le resteront toute leur vie. Même
    s'ils parviennent aux situations humaines les plus élevées, ils resteront stigmatisés.

    Les majoritaires se donnent comme la référence de l'humain. Ils relèguent les autres dans les
    marges extérieures de la société. Ils les tolèrent et même ils les encensent lorsque ceux-ci manifestent
    des talents exceptionnels. Les découvertes scientifiques et les avancées de la pensée dues à des juifs,
    les créations artistiques dues à des homosexuels, la grandeur humaine manifestée par des noirs comme
    Nelson Mandela ou Koffi Annan ont de quoi faire pâlir d'envie la majorité blanche et hétérosexuelle
    de nos pays occidentaux. Mais de telles louanges ne sont qu'une éclaircie dans le ciel des minoritaires.

    Les minoritaires sont en général la cible de quolibets, tournés en dérision, caricaturés. C'est
    la meilleure façon, pour les majoritaires, d'assurer leur supériorité. Les Nazis ont fait des Juifs des
    êtres inférieurs et nuisibles. Les Hutus, avant de se lancer dans le génocide des Tutsis, ont multiplié les
    sarcasmes, les réduisant à l'état de cancrelats. Les délits de faciès concernant les noirs et les arabes
    sont toujours d'actualité et l'image des «folles» continue d'entretenir le rejet des homosexuels. On
    trouve toujours le trait qui va ridiculiser l'autre pour s'excuser de le rejeter avant de le tuer. On se
    persuade que la réalité est bien celle qu'on définit car il convient de se donner bonne conscience.

    Toute personne est porteuse du germe du racisme à l'égard d'une minorité quelconque car la
    différence étonne et inquiète. Aussi longtemps qu'on ne s'est pas laissé apprivoiser par celui ou celle
    qui ne s'habille pas, ne mange pas, ne prie pas, n'est pas comme nous, nous répugnons à l'accepter
    dans la communauté humaine à laquelle nous avons la chance d'appartenir. On se demande comment
    il peut vivre en étant comme il est. Et même comment il peut ne pas avoir honte d'être comme il est.

    Les majoritaires éprouvent le désir de ramener tous ces gens à la raison, de les voir vivre
    comme eux, sainement. Pour parler de ceux dont on parle aujourd'hui, pourquoi tous les Juifs ne
    renoncent-il pas à leur judaïté et ne deviennent-ils pas «comme tout le monde» ? Pourquoi certains
    d'entre eux se promènent-ils encore avec de grands manteaux, des chapeaux et des papillotes ?
    Pourquoi tous les homosexuels ne font-ils pas un petit effort pour être, eux aussi, « comme tout le
    monde» et, s'ils n'y parviennent pas, pourquoi ne prononcent-ils pas tous le vœu de chasteté?

    Aussi longtemps que nous ne nous laisserons pas déranger par ceux que nous dénigrons, aussi
    longtemps que nous ne pousserons pas la « charité» jusqu'à leur faire confiance a priori, avant toute
    argumentation et tout jugement, nous ferons profession de racisme. Pour critiquer avec justesse il faut
    comprendre et aimer, parfois pleurer avec, lorsque surgissent le mépris, la persécution et la haine.

    Nous devons accepter le fait que les différences viennent de Dieu. C'est lui qui a appelé
    Israël. Même si l'Alliance s'est élargie, le peuple juif demeure l'aîné. C'est Dieu qui fait de chacun de
    nous un être unique, différent dans toute sa personnalité selon les lois d'une nature qu'il a lui-même
    ordonnée, chacun avec ses dons et ses particularités. Le rejet de l'autre fait offense à Dieu.

    Les minoritaires savent malheureusement qu'ils ne pourront jamais éviter d'inquiéter les
    majoritaires et de leur être un fardeau. Toujours ils susciteront agressions et railleries. Rien d'étonnant
    donc que parfois ils se rebellent ou désertent la scène, se réfugient sur la terre de leurs ancêtres ou
    s'isolent dans le dédain hautain que leurs dons naturels leur permettent. Ils se souviendront toujours
    qu'ils ne sont qu'une marge mal supportée. L'oublieraient-ils que demain le leur rappellera, du moins
    dans nos régions dites civilisées où la Voix du salut a pourtant retenti pour tout le genre humain.

    Croyons-nous vraiment que ce soit pour tous ?

     

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