• 16 février 1998 - Le retour au passé.

    Le retour au passé.

    A une époque où l’avenir n’a jamais offert autant de possibilités, nous ne cessons de nous tourner vers le passé : cinquantenaires et centenaires ponctuent notre vie sociale.

     

    Il est un bon usage du passé et des souvenirs.

    Tout ce qui nous permet de retrouver nos racines et notre culture originelle, tout ce qui nous façonne sans que nous nous en rendions compte, constitue un enrichissement.

    Savoir d’où nous venons et où nous allons est nécessaire à la connaissance de nous-mêmes. Nous y puisons une compréhension plus profonde des réactions qui nous sont propres et de notre attirance pour certaines formes de pensée…

    Une connaissance de notre passé personnel et communautaire contribue à l’élaboration de notre personnalité, à son acceptation par nous et par les autres, dans la fierté de ce qui nous caractérise. Le passé nous a construits, emparons-nous de lui.

    Il a pu être glorieux et nous en sommes auréolés.

    Il a pu être glauque et douloureux, trouvons notre gloire dans le fait de l’assumer et de le dépasser. Tous les peuples, toutes les institutions et toutes les personnes ont à se faire pardonner un certain nombre de comportements douteux. Ne nous enlisons pas dans la honte.

     

    Mais le passé peut être un piège.

    On peut se replier sur les traditions du passé non pas au nom de leur valeur intrinsèque, mais par nostalgie, comme si le retour au passé était une fin en soi.

    On peut également y trouver la justification à une condition malheureuse présente et à l’absence d’effort pour en sortir.

    En fait, nous devons convenir que nous sommes bien souvent happés par notre passé, que nous le voulions ou non. Il nous façonne et nous conditionne. Même si nous voulons le dépasser, il ne cesse de nous retenir, d’être prégnant en nous, comme il l’est pour ces «intouchables» de l’Inde, parvenus à des situations honorables dans leur société et qui se considèrent toujours en situation de rejet.

    Mais, tournés vers l’avenir, il nous appartient de tirer un trésor et une fierté de ce qui fait notre différence, même si elle est due à l’humiliation de nos ancêtres, et d’expulser de nous les sentiments qui entretiendraient le malaise et la haine.

     

    Cette année sera marquée par le cent cinquantième anniversaire de l’abolition de l’esclavage. Cette commémoration peut nous tirer vers le passé ou nous orienter vers l’avenir.

    Le passé sera forcément rendu présent, et il doit l’être, au même titre que nous devons, cinquante ans après, nous imprégner des images de la Shoah pour prendre conscience de ce qu’elle fut et nous éviter de recommencer de telles atrocités.

    Commémorer l’abolition de l’esclavage, c’est regarder les images du passé, mais c’est aussi se tourner vers l’avenir, puisqu’il s’agit d’une libération.

    La liberté n’est pas donnée pour ressasser sans cesse le passé, en érigeant un culte à la souffrance des ancêtres. La liberté est donnée pour construire l’avenir une bonne fois pour toutes, car elle établit une égalité immédiate entre tous.

    La liberté et l’égalité sont acquises en droit. Il convient de les faire passer dans les faits, par la prise de conscience qu’il en est bien ainsi, tout en sachant la difficulté et la lenteur requise par un tel changement de statut social.

    Ce ne peut être l’œuvre que d’une conquête de l’esprit.

     

    Mais regarder un tel passé de souffrance, c’est ouvrir les yeux sur les nouvelles formes d’esclavage qui foisonnent un peu partout dans le monde : le sous-développement de nombreux pays, la prostitution ou le travail des enfants, l’exploitation de nombreux travailleurs immigrés dans des pays qui leur doivent leur richesse, l’absence de droits pour certaines femmes… sans oublier qu’il existe encore de vrais esclaves dans quelques pays !

    La raison de cette survivance de l’esclavage est simple : l’esclavage, qui existe depuis la plus haute antiquité, a toujours été lié à l’économie : avoir une main-d’œuvre bon marché ou gratuite pour accumuler des richesses. Aujourd’hui comme hier… et comme demain ?

    Aux descendants des anciens esclaves et à ceux qui ne veulent pas que cela continue de travailler à la libération effective des esclaves contemporains.

    Fr. André LENDGER

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