• 14 novembre 1999 - Religions, Etats, ethnies.

    Religions, Etats, ethnies.

    A chacun sa religion ?

     

    Le monde contemporain est traversé par deux courants contraires :

                - la mondialisation qui tend à unifier tous les pays de la planète grâce à un maillage serré de l’économie, des modes et de la culture.

                - l’éclatement des grandes unités politiques et culturelles pour permettre à chaque entité historique, religieuse ou ethnique de s’exprimer.

    Cela signe l’échec des grand empires qui n’ont pas su faire droit à la diversité des peuples qui les constituaient avec leurs légitimes différences. Mais cela signe également l’échec des minorités qui n’ont pas pu faire entendre leur voix autrement que par la rupture.

    Le poids de l’histoire des peuples joue son rôle. Comment expliquer autrement le drame du Rwanda, sinon par les relations déséquilibrées qu’ont entretenues deux ethnies pendant des siècles ? L’Irlande, le Tibet, la Tchétchénie et bien d’autres n’échappent pas tout à fait à ce schéma. Les revendications plongent leurs racines bien en deçà des situations concrètes contemporaines. Etre soi sans les autres, tel est le rêve de nombreuses minorités !

    S’exerce ainsi un contrepoids à l’hégémonie des grands. Mais les tentations centrifuges risquent de conduire les minorités dans des impasses politiques, économiques et culturelles. Elles sont tentées de se replier sur elles-mêmes, entretenant la nostalgie de ce qu’elles n’ont pas été, de ce qu’elles ne sont pas encore et de ce qu’elles ne seront peut-être jamais.

     

    Ces mouvements sont souvent liés à la liberté religieuse. Pensons seulement aux chrétiens du Soudan obligés de vivre dans un Etat islamique avec la seule charia comme loi.

    L’effet pervers de ces révoltes est de se débarrasser d’un joug sans prendre le soin de vérifier sa propre foi qui risque de n’être plus qu’une bannière vide ou un prétexte politique.

    Or nombre de durcissements en matière religieuse viennent du refus de faire une analyse sérieuse de la foi qu’on défend. On mélange les légitimes réflexes identitaires au simple retour aux valeurs du passé… qui sont déjà dépassées. On aboutit à une sclérose tant religieuse que politique, qui fait le lit de n’importe quelle mondialisation matérialiste à venir.

    En quelque domaine que ce soit, politique, ethnique, culturel ou religieux, on s’achemine vers un émiettement qui tourne le dos à l’universalité qui est notre véritable tâche.

    Chacun aujourd’hui prétend être libre mais se rend prisonnier de son propre système.

    Chacun se prétend porteur de valeurs universelles, mais les garde précieusement dans ses frontières et combat les autres qui ne se croient pas moins universels.

    Les dialogues de sourds au nom d’antiques querelles passent pour des faits d’armes et n’aboutissent qu’à crisper chacun sur sa vérité comme un avare sur son  trésor.

    Au nom du Dieu Unique et Universel, chacun campe sur ses frontières politiques et affectives. Une religion = une sensibilité et des frontières. Des frontières et une sensibilité = une religion. Tel est l’idéal entrevu par certains. Comment dès lors prétendre à l’universalité ?

     

    Or la plupart des grandes religions contemporaines, non seulement abrahamiques mais également orientales, prétendent à l’universalité mais ne s’engagent pas dans un dialogue qui seul permettrait de cheminer dans une recherche commune.

    Le récent déplacement du pape en Inde et en Géorgie en témoigne : chacun défend son identité. La religion traditionnelle de l’ethnie ou de la famille est considérée comme un héritage indiscutable. Cette réaction, pour naturelle qu’elle soit, comporte le danger de se barricader comme on le fait dans une citadelle assiégée et de préparer la route au fanatisme.

    Dans un contexte de concurrence, les manifestations religieuses, qui rassemblent des foules facilement manipulables, peuvent avoir des effets incontrôlables, jusqu’à imposer des lois insupportables aux minorités d’un pays. C’est ainsi que naissent des mouvements de résistance, des guérillas, et même des guerres. Mourir plutôt que de se voir imposer des lois d’inspiration religieuse par un pouvoir intolérant !

    La recherche de la vérité disparaît derrière l’immédiat passionnel.

    Ainsi la religion devient-elle une arme politique. Au lieu d’être un facteur d’unité entre des hommes respectueux des croyances les uns des autres et cherchant Dieu, elle devient source d’opposition, de conflit, de mort.

    Y compris la mort de Dieu.

    fr. André LENDGER

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