• 22/01/1995 - Jean-Paul II à Manille. Mgr Gaillot en France. Deux événements religieux majeurs et contrastés.

    Deux hommes dont la personnalité est forte.

    L'un et l'autre cherchent à annoncer l'évangile de Jésus.

    L'un et l'autre sont des hommes rompus aux médias, l'un dans l'universalité de sa charge, l'autre dans les limites de sa mission, même si tout évêque l'est de l'Eglise entière.

     

    La décision de Rome - bien que prévisible - a choqué, car l'évêque d'Evreux s'est acquis une sérieuse popularité qui dépasse de beaucoup les limites de l'Eglise.

    Elle fait de Mgr Gaillot un martyr, le consacrant même comme le porte-drapeau de ceux qui éprouvent un malaise à l'égard de l'Eglise.

    Lui qui se voulait à l'écoute des problèmes personnels de chacun et proche des exclus se trouve exclu à son tour.

    La logique de l'exclusion pose problème en ce cas comme en beaucoup d'autres.

     

    Cependant, à lire les discours du pape et les déclarations de nombreux évêques, qui douterait que les exclus et les pauvres ne soient au cœur des préoccupations de tous ?

    La sanction visant Mgr Gaillot ne peut donc être ramenée - sous peine de simplisme - à des divergences concernant les priorités de l'Eglise : les pauvres, les marginaux, la justice et la paix sont des questions centrales pour les uns et les autres.

    Certaines réactions lues et entendues font penser qu'on ne peut être "pour" (les pauvres...) que si on est "contre" (Rome).

    A l'inverse, on ne pourrait pas regretter le geste de Rome sans manifester une allégeance à Mgr Gaillot.

    Quelle que soit la cause, il n'est pas honnête de prétendre la faire avancer uniquement parce qu'on est contre quelqu'un ou une institution.

    La liberté des uns et des autres, y compris la nôtre, risque d'être très malmenée si nous nous laissons prendre aux pièges de cette polémique !

     

    On peut remarquer, à propos de cette affaire :

                - que l'Eglise intéresse plus que ce qu'on dit,

                - que son message est attendu par tous,

                - que ce message, tel qu'il est attendu, ne peut pas ignorer l'évolution de la vie sociale, les progrès de la technique, le sida et bien d'autres paramètres.

                - que les médias prennent en charge, amplifient et orientent le type de discours attendu selon un modèle soit-disant démocratique du type : "si 70% des hommes attendent tel type de discours, Rome devrait le tenir !"

     

    C'est peut-être dans ce domaine médiatique que le divorce entre Rome et Mgr Gaillot est le plus patent : l'engagement de l'évêque d'Evreux a revêtu une forme originale, spectaculaire et percutante, largement relayée par les médias.

    Il a pris, concernant les problèmes de la morale individuelle (le préservatif, l'IVG...), des positions qui ont fait sa popularité, mais qui ne peuvent qu'indisposer une institution qui refuse de s'aligner sur les sondages pour dire son message.

    Cela peut sembler une question de méthode, l'institution tenant bon à une certaine "langue de bois", l'autre s'exprimant comme un homme libre et responsable.

    Mais on n'a jamais vu une institution humaine s'aligner sur un discours prophétique.

     

    Il faut bien reconnaître qu'à l'origine du conflit se trouvent des oppositions radicales: une Eglise qui, sur le chapitre de la morale individuelle, maintient un discours qui apparaît tranchant, sans nuance ni miséricorde et un homme qui a voulu engager cette même Eglise dans une voie apparemment plus ouverte, à l'aide de gestes et de paroles à forte portée symbolique, mais de façon finalement solitaire.

    Or aucun projet, aucune action novatrice ne peuvent aboutir si leur promoteur demeure un homme seul. Dialogue et remise en cause permettent seuls d'éviter la solitude.

    Quelle société humaine - et l'Eglise en est une - peut éviter ce genre d'affrontements où le choc des idées recoupe les conflits entre personnalités fortes et opposées, leurs entêtements et leurs justifications ?

    L'histoire de l'Eglise - et de toutes les religions - regorge de telles situations.

     

    Qu'on regrette ou non la mesure de Rome à l'encontre de Mgr Gaillot, il est bon de ne pas se laisser entraîner par des à priori faciles, mais d'essayer de comprendre !

    fr. André LENDGER

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