• 1er février 2004 Sang.

    Le sang est répandu en abondance par la violence des hommes dans ce temps qui est le nôtre : guerres, terrorisme, tortures, meurtres, blessures. La barbarie reste à l’ordre du jour. Ce n’est pas parce que nous tuons avec des moyens sophistiquées, sans toujours voir qui nous tuons, que nous sommes moins sauvages que nos prédécesseurs. Le goût du sang trouve encore des amateurs, les génocides récents en témoignent, ainsi que les représailles qui succèdent aux attaques où que ce soit.

    Principe vital, le sang l’est, dans la réalité comme dans l’imaginaire des hommes. Il est le symbole de la vie. Il a un caractère sacré. Le sang de l’homme devrait faire l’objet de tous nos soins. Or depuis le meurtre d’Abel, les hommes ne cessent de tuer leurs frères. Le sang d’Abel a beau crier vers Dieu inlassablement depuis ce jour, rien n’y fait. Dieu n’arrête pas la folie des hommes. Il se refuse également à faire disparaître les coupables. Il ne veut pas la vengeance. N’a-t-il pas protégé Cain ? Tout tueur bénéficie de la même protection. Dieu refuse de punir le crime de sang par le sang.

    Le sang est fait pour couler dans les veines et nourrir le corps, non pour être répandu sur le sol. Chacun le sait, la moindre maladie peut être décelée par le sang qui véhicule le meilleur mais aussi le pire en ce temps de virus. Le sang fait signe du moindre déséquilibre de l’organisme. La vie peut être sauvée par le sang volontairement donné et partagé. Au lieu de faire couler le sang d’un autre jusqu’à la mort, nous pouvons sauver sa vie par le don de notre propre sang.

     

    Tout au long de l’histoire religieuse des hommes, le sang a revêtu une telle valeur qu’il fut longtemps considéré comme la plus belle offrande à faire aux divinités. Que donner de plus précieux à un dieu sinon ce qui est au principe de la vie, qui a été reçu comme un don, mais qui demeure menacé en permanence, peut-être même par des divinités vengeresses assoiffées de sang ? On commença par verser le sang des enfants ou des ennemis, puis on a « humanisé » le rituel en se contentant du sang des animaux, les dieux étant censés être devenus moins exigeants.

    Les dieux ont-ils réellement éprouvé le besoin d’être honorés par du sang ? Verser le sang, c’est toujours faire une violence à la vie. Verser du sang pour honorer une divinité, c’est commettre un acte violent ; c’est estimer que la violence sanglante est aimée par cette divinité et qu’elle y trouve plaisir ; c’est faire de la violence une des pièces maîtresses de la vie quotidienne des hommes. Certes offrir le sang d’un animal vaut mieux qu’offrir le sang d’un homme, fut-il son ennemi, mais le problème de fond demeure : comment se peut-il que des dieux prennent plaisir à voir couler le sang dans un rituel religieux , attisant ainsi la violence naturelle qui est au cœur de l’homme,?

    Tous les grand prophètes d’Israël qui ont précédé le Christ, pendant des siècles, ont fait part de l’écœurement du Dieu unique devant les sacrifices de bêtes grillées et les holocaustes fumants. « Ils ne servent à rien », disait-il. Dieu se sentait outragé qu’on ose penser qu’il prenait quelque plaisir au sang répandu pour lui. Il ne cessait de répéter : « Tous vos holocaustes me font vomir », « Pratiquez plutôt la justice et l’accueil du pauvre », « Venez à moi avec un cœur contrit ».

     

    Pourtant il n’est pas dit que tout sang versé ne serve à rien. Il n’est pas dit que ce symbole de la vie, par le don unique et total non plus d’un animal mais d’un homme juste, Jésus, n’ait pu avoir une valeur que Dieu reconnaisse. Non que ce sang versé ait été agréable à Dieu. Dieu n’a pu que souffrir de la brutalité et de l’aveuglement des hommes qui ont mis à mort l’homme-Dieu, son Fils. Les hommes rejetaient le Dieu de paix qu’il annonçait. Ils se sont retournés contre ce Dieu qui refusait d’être à l’image de la violence qui les habitait. Dans la personne de son fils, Dieu s’est offert lui-même à la mort. Dieu a fait en sorte que ce sang n’ait pas été répandu en vain, mais témoigne au contraire de son amour pour les hommes. Au cœur de sa souffrance, il a fait de ce sang injustement versé le lieu de sa réconciliation avec les hommes. Il a retourné l’horreur du crime en don d’amour. Désormais nous en avons fini avec les holocaustes. L’humanité est sur le chemin de la justice, de la paix et de l’amour, si elle le veut bien. Ce sang versé, et celui-ci seulement, sert au salut des hommes.

    Le Dieu unique de l’univers, par son sang versé, propose aux hommes d’en finir avec tout sang versé. Il propose d’en finir avec le sang versé des hommes que des haines primitives dressent les uns contre les autres. Il propose aussi d’en finir avec le sang versé des animaux sous forme de sacrifices. Quelle que soit la bonne foi et les bonnes intentions de ceux qui cherchent à lui plaire et à le rejoindre par ces sacrifices, ceux-ci ne servent à rien. Dieu n’a que faire des holocaustes. Il ne regarde que le cœur de ceux qui les font, et s’attriste de leur retard à trouver le chemin du Royaume débarrassé de toute violence et de tout sang versé, hors celui, réconciliateur, du Fils de l’Homme.

     

    Puisse le sang versé par les hommes se tarir au contact du sang versé par le fils de Dieu.

    Il suffit !

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