• 14 avril 2002 Les vertus de la guerre.

    La multiplication des conflits armés dans le monde laisse penser que nombreux sont les dirigeants qui en attendent beaucoup de bénéfices.

    Il est des situations où la guerre apparaît être la seule issue. La paix, en effet, nécessite le consentement des deux parties, dans un respect réciproque ; si l’une des parties bloque ou pose des revendications perçues comme impossibles à satisfaire par l’autre partie, la paix se trouve fragilisée et la guerre peut être perçue comme la seule issue… si on a quelque espoir de la gagner. Se battre seulement pour l’honneur serait suicidaire.

    Ce qu’on ne sait pas, lorsqu’on déclare une guerre, c’est ce qui en sortira. On ne rétablit jamais l’ordre ancien ; de la guerre naît un ordre nouveau. Même gagnée, la guerre modifie les rapports entre nations, mais aussi à l’intérieur de chaque nation. La belle unité nationale du temps de l’état de guerre peut se craqueler. Le vainqueur peut en ressortir aussi exsangue que le vaincu. Le vainqueur peut vouloir humilier le vaincu ; il fera ainsi le lit de conflits ultérieurs. Que signifie alors la victoire ? Il faudra bien finir par s’entendre.

    On peut espérer modifier une fois pour toutes le rapport des forces et imposer sa vision de l’ordre mondial. Jusqu’au jour où l’on s’effondrera et où un autre prendra la relève.

    Les vertus de la guerre n’équilibreront jamais leur nuisance et n’empêcheront pas d’avoir à traiter un jour à égalité avec son ennemi d’hier puisque la vraie paix n’est qu’à ce prix. Or la paix est un bien supérieur. C’est donc dans le souci d’une inlassable  recherche de cette paix que peuvent et doivent se discuter les problèmes internationaux et se trouver une solution aux inévitables tensions, rapports de force, et conflits de toute nature entre les Etats.

     

    Les choses ne sont cependant pas si simples. La violence habite tous les hommes et pas seulement les gouvernants. Beaucoup acceptent la guerre comme en témoignent des sondages

    Avant le 11 septembre, la cote de popularité de M. Bush n’était pas brillante. Dès l’instant où il a déclaré la guerre aux Talibans, la satisfaction éprouvée par les Américains à son égard est montée à des sommets dans les sondages. Il est clair qu’il n’aurait pas bénéficié d’une telle popularité s’il avait engagé une démarche d’un tout autre ordre.

    Avant l’opération « Mur de protection », les sondages ne donnaient à M. Sharon qu’un taux de satisfaction de moins de 50 %. Depuis les opérations contre les Palestiniens, sa cote de popularité est remontée à plus de 70 %.

    Autant dire que les citoyens des pays concernés estiment que la guerre est une bonne décision. Cela ne peut qu’inciter les hommes d’Etat à avoir des positions inflexibles, puisque cela leur rapporte la popularité dont ils ont besoin pour établir leur pouvoir. L’exemple est d’autant plus frappant que les opérations menées par les deux hommes d’Etat ne se contentent pas d’être défensives (ce qui pourrait les justifier), mais elles visent à obtenir unleadership mondial pour l’un, régional pour l’autre. Or une telle disposition d’esprit est inquiétante parce qu’on ne peut pas établir la paix à long terme en imposant un rapport de domination.

     

    Les peuples se conduisent comme les personnes individuelles : à une agression, dans la mesure où on le peut, on répond par une autre agression, parfois plus grave.

    Ils ne sont pas rares les exemples de personnes (souvent des commerçants) qui, agressées exclusivement dans leurs biens, répondent en tuant le délinquant. Une telle réaction est parfaitement explicable et parfois excusable. Mais un Etat de droit ne peut accepter qu’on se fasse justice à soi-même. Le droit international, lui, est impuissant à imposer la même démarche aux Etats. A des agressions à mains nues, un Etat a le droit de répondre en sortant toute sa panoplie d’armes dernier cri. L’autre, pense-t-il, finira bien par se taire. Sans doute ! mais il se tairait d’autant mieux que cet Etat s’attaquerait aux causes sociales ou politiques du mal et qu’il mettrait toute son énergie à les supprimer. Sinon d’autres récidiveront.

    La guerre est une violence bien ancrée dans les mentalités. Elle est une arme politique. Elle permet de reconquérir parfois, dans une véritable fuite en avant, la confiance d’un peuple, d’assouvir des vengeances locales, de se faire respecter par la force. Elle peut être aussi utilisée pour rassembler, dans des milices, des jeunes désœuvrés qui ont grandi dans la violence, et qui seront trop heureux de la mettre au service d’un dictateur quelconque.

     

    La guerre est une violence intolérable. A nous de faire, de cette violence qui nous habite tous, une arme de paix.                                                                       Fr. André LENDGER

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